Steve Jobs de Walter Isaacson
martin | 23 décembre 2011 | 23:59Lors de sa parution, ce livre a beaucoup fait parler de lui, sa sortie ayant eu lieu peu après le décès de Steve Jobs.
Passionné par l’innovation et la technologie et récent fan des produits Apple et de la façon de surprendre le marché qu’a cette marque, j’ai voulu en savoir plus que ce que je savais déjà sur le co-fondateur et cerveau de cette magnifique entreprise qu’est Apple.
Plus que la vie de Jobs, la vie de Apple et de la Silicon Valley
Malgré sa taille de 668 pages, ce livre se lit facilement car, plus que le récit de la vie de Steve Jobs, c’est également le récit de la Silicon valley et de l’évolution du business technologique des années 70 à nos jours.
On y suit la naissance des grosses entreprises et on y trouve beaucoup d’anecdotes et de secrets du milieu des entreprises technologiques californiennes.
Le récit de la vie de Jobs sert de fil conducteur au récit global qui, bien que se focalisant sur la vie du co-fondateur de Apple détaille très longuement l’organisation de la société, ses concurrents et la genèse de tous ses produits du premier ordinateur aux tout derniers iPads.
Avec du recul, on comprend mieux certaines choses qui se sont passées dans telle ou telle entreprise ces dernières années, Jobs et l’auteur de la biographie les expliquant clairement au travers d’anecdotes.
Par exemple, à la fin, lors des dernières rencontres de Jobs avec les CEOs des entreprises de la vallée, il leur prodigue quelques conseils tel un sage prêt à tirer sa révérence.
Le livre relate ainsi qu’il conseilla à Larry Page de Google, d’abandonner certains des projets de l’entreprise afin de se rencentrer sur son coeur de métier. Il y a quelques semaines de cela, Google annonçait l’arrêt de plusieurs de ses services. Faut-il y voir une coïncidence ?
Remarque sur la traduction
J’ai lu ce livre dès sa sortie, d’abord en anglais puis en français. Le propos m’a semblé plus détaillé et moins redondant dans la syntaxe en anglais, la traduction française étant un peu simpliste et donnant un style minimaliste parfois. Cela dit, cela se lit du coup très facilement mais c’est dommage car la version anglaise ne m’avait pas laissé ce sentiment-là.
Sur les citations, la version anglais passe bien mieux également. Les grandes phrases de Jobs, restées dans les mémoires telles que “Stay Hungry, stay foolish” rendent bien mieux en anglais qu’en français.
Mon ressenti lors de la lecture
J’ai dévoré ce livre et en suis ressorti les yeux embrumés tant par l’émotion de l’inéluctable fin de l’histoire qui m’a fait me dire que l’économie numérique avait perdu un de ses grands leaders d’opinion mais aussi par mes idées et rêves d’entreprise qui n’ont été que renforcés à la lecture de ce magnifique parcours de passionné persuadé d’être dans le vrai avant que le reste de l’économie ne le réalise et poussant ses produits avec force en ne cédant jamais aux contraintes budgétaires ou techniques.
Toute cette biographie est la preuve qu’en entreprise, on ne fait pas “d’omelette sans casser d’oeufs” ni “de confiture avec de l’eau” pour reprendre des expressions chères à ma grand mère et que malgré une originalité parfois marginale, on peut réussir.
La dualité du personnage envers les autres
Steve Jobs en était la preuve vivante. Se baladant longtemps pieds nus chez Apple, privilégiant un “uniforme” composé d’un jeans, de baskets et d’un col roulé noir, il détonnait dans l’univers des entreprises high-tech plus souvent représentées par des dirigeants en costume cravate et au langage policé que par un passionné aux réflexions directes et parfois peu orthodoxes qui pouvait se mettre à pleurer lors de réunions si les décisions prises ne lui convenaient pas.
Intransigeant, perfectionniste au point de reprendre certains projets de 0 après des mois d’études s’il ne les jugeait pas au point, il savait s’entourer des meilleurs et n’hésitait pas à rejeter loin de lui les faibles ou incompétents qu’il qualifiait d’ailleurs de “merdes” en opposition aux “génies” dans une vision duale très basique des personnes, chacun des extrèmes pouvant qualifier une même personne selon l’humeur du personnage ou ce qu’il présentait à Jobs d’un jour sur l’autre.
D’après Jobs, tout le monde était remplaçable même s’il sélectionnait très durement ses collaborateurs et était un manager peu sentimental. Un seul homme était aux yeux de Jobs irremplaçable en fait, Johnny Ive, le designer de génie de Apple, à l’origine des plus beaux produits de la marque de l’iMac aux tout derniers iPads.
La relation qu’entretenait Jobs avec cet homme était proche d’une relation symbiotique d’après ce qu’il est décrit dans le livre, Jobs passant quasiment tous les jours dans l’équipe du design pour voir les dernières évolutions de l’équipe.
Une vision des produits où matériel et logiciel sont imbriqués
Il voyait également ses produits dans leur ensemble, tant au niveau de la relation matériel/logiciel mais également en imaginant leur imbrication dans un écosystème centré autour d’eux-mêmes ou des contenus Apple déjà existants.
Le Chaos qu’on vit aujourd’hui dans la société est d’ailleurs peut-être un exemple de ce que Jobs voulait combattre avec Apple, le résultat d’un système trop souple et empli de trop de liberté pour que chacun y soit bien. Platon disait que la meilleure façon de gouverner serait une dictature menée par un dictateur bien intentionné et éclairé, ce qu’était Steve Jobs chez Apple et dans le monde de la technologie.
Loin de vouloir faire de l’argent, ce dont il se défendait, il imposait ses choix en promettant de la liberté aux utilisateurs mais en les enfermant en fait dans son système doré et confortable, ce que recherche la plupart des consommateurs d’aujourd’hui : ne pas se prendre la tête pourvu que tout fonctionne et soit sympa à utiliser. Steve Jobs excellait en cela avec ses produits et a fait de Apple l’entreprise la plus riche du monde.
Mon avis global sur le livre
J’ai beaucoup aimé ce livre qui m’a fait découvrir le personnage Steve Jobs derrière le show man des keynotes que j’adorais suivre en grand fan du monstre médiatique.
J’y ai découvert un homme d’une sensibilité que je n’imaginais pas, très détaché du côté matériel une fois ses besoins primaires adressés, un homme visionnaire qui n’avait pas peur d’être détesté et qui l’était certainement autant par ses collaborateurs qu’il pouvait être adoré par d’autres et par ses clients pour sa vision, son charisme et son idée parfaitement limpide de là où il voulait aller.
Je pense m’être un peu retrouvé dans certaines parties du personnage, sa passion de la technologie, son envie de voir les produits comme des ensembles, son côté “lâche rien”, ce qui m’a fait apprécier encore plus cette aventure humaine qu’a été sa vie pendant laquelle tout a toujours semblé possible. Ce livre m’a de plus beaucoup fait rêver évoluant professionnellement dans le milieu du web et étant affamé de nouveaux services, imaginant constamment comment améliorer les produits en place. Son oeuvre est la preuve qu’on peut aller au bout de ses idées sans ne rien lâcher au niveau de la qualité des produits ou de ses idées en ayant toujours faim et en restant motivé.
L’image que je garderai de ce livre et de lui est cette maxime de vie, prononcée lors du discours de remise des diplômes de Stanford en 2005 : “Stay hungry, stay foolish”.
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