“On n’a plus le temps…” ou comment le Monde diplomatique nous aide à prendre du recul
martin | 12 octobre 2012 | 17:37On a beaucoup évoqué récemment dans les médias le sort de la presse. En proie à des difficultés financières, à la concurrence d’Internet mais également au désamour des lecteurs. J’ai pour ma part toujours pensé que les torts étaient partagés entre les lecteurs et la presse.
Les lecteurs, à l’image de notre société se rendent souvent coupables de facilité et de fainéantise alors pourtant que tout se complique dans notre monde et qu’une connaissance de l’économie, de la société et des rapports sociétaux est que plus jamais nécessaire. Alors qu’il faudrait préférer, comme dans la plupart des domaines, la qualité en faible quantité plutôt que la faible qualité en grande quantité, le lecteur préfère se gaver de brèves, de titres choc vite lus, de feuilles gratuites survolées entre 5 stations de métro et aussitôt jetées.
Les entreprises de presse quant à elle veulent bien souvent en faire trop, constamment surnager face à leurs concurrents grâce à de pseudo-scoops markétés, de belles phrases de une ou par une simplification de l’information, au risque de blaser les lecteurs et de se décrédibiliser, là où leur rôle devrait être au contraire de calmer le jeu et d’apporter des clés de lecture de notre monde. Alors que leur promesse devrait être de rester dans un niveau d’analyse et de gamme supérieurs, ils se rabaissent pour ratisser plus large. J’ai toujours eu tendance à penser que ce n’était pas en nivelant le niveau vers le bas qu’on faisait grandir un ensemble, ce qui me laisse assez dubitatif sur les chances de relance à long terme du secteur de la presse.
Les lecteurs, se rendant probablement compte également de la faible valeur ajoutée de certains quotidiens en regard du prix, des biais de cette presse anciennement élitiste sur le fond et parfois snobinarde sur la forme, préfèrent souvent se tourner vers des sources d’informations plus simpl(ist)es, bien souvent gratuites et plus rapides. Lorsqu’on évoque cela avec des anciens lecteurs ou mêmes des e-lecteurs d’aujourd’hui, l’argument qui revient régulièrement est celui du manque de temps.
Dans son numéro d’Octobre, le Monde diplomatique fait écho à cette réflexion et évoque avec l’érudition et la sagesse qu’on lui connaît ce changement dans la société, ses répercussions sur son modèle économique et plus globalement sur celui de la presse. C’est passionnant et vraiment instructif.
On a déjà entendu tout ça, ces réflexions, me direz-vous. En effet, sauf que là, au lieu de tirer sur tout ce qui bouge et de ne pas prendre de recul comme le font régulièrement les patrons de presse, cognant souvent trop rapidement sur Google, la presse gratuite, le numérique, Serge Halimi nous livre ici une analyse à l’image de son mensuel, toute en retenue et analytiquement très pertinente.
Justement titré “On n’a plus le temps…” ce long article décrypte les raisons de ce changement de comportement des lecteurs et livre des ébauches de solutions tout en faisant des parallèles avec la société. Se disant en difficulté et s’infligeant en plus des contraintes que d’autres n’ont pas (peu ou pas de publicité ), le journaliste livre sa vision de cette mutation, tente d’apporter des solutions et comme toujours avec ce mensuel, tout est d’une limpidité et d’une justesse rarement lues ailleurs.
Les causes possibles et souvent avancées par les autres sont pesées, mesurées et finalement, on se rend compte que loin d’être limitée à une seule cause, la baisse du secteur de la presse est multi-factorielle. Faisant également écho à la société, l’article invite le lecteur à “prendre le temps” pour “défricher les sentiers de nouveaux rapports sociaux, économiques, écologiques”, rappelant au passage la primeure de certaines idées politiques majeures reprises ensuite comme la taxe sur les transactions financières ou le plafonnement des revenus.
Faisant écho à ce sujet d’actualité qui est le sort de la presse, le Monde Diplomatique nous rappelle donc que prendre du recul est plus que jamais nécessaire, ses valeurs le prédisposant d’ailleurs à nous y aider. Je vous conseille donc la lecture de ce numéro, très riche, comme toujours pour découvrir le journal si ce n’est déjà fait et pourquoi pas, vous aussi le lire régulièrement pour aider à perpétuer une certaine idée de la presse et un regard reculé et apaisé sur notre société et le monde.
Pourrais tu le scanner et me l'envoyer?! Si tu as le
Cec | 15 octobre 2012 | 22:04Pourrais tu le scanner et me l’envoyer?!
Si tu as le temps bien sur
La Londonienne