“Hôtel de l’insomnie” de Dominique de Villepin, Ed. Plon
martin | 8 juin 2008 | 23:21Avant de commencer ce livre, je savais plus ou moins ce que je voulais y trouver : une richesse dans le contenu, un usage parfait de la langue française au service du style lyrique et cultivé de Dominique de Villepin. J’espérais satisfaire ma soif de backstage politique. Ce ne fut pas le cas sur ce dernier point. Pour le reste, je sors de cette lecture pleinement satisfait et ne demandant qu’une seule chose. A quand le prochain ?
Quelques semaines avant la sortie en librairie de ce livre, j’avais lu un teaser faisant la promotion de l’ouvrage, une accroche dans laquelle, le « journaliste » évoquait un possible scandale car le livre devait parler des non-dits de la période de D. de Villepin au poste de chef de gouvernement. A l’époque, toute la presse se passionnait pour l’opposition supposée de l’auteur avec celui qui était devenu Président, Nicolas Sarkozy.
C’est un peu le fil conducteur du livre, je dois reconnaître mais c’est surtout la justification à l’évocation de poètes, de personnages historiques et de grands hommes du passé. D. de Villepin est un homme fort érudit et il le démontre encore une fois. On n’a pas non plus affaire à un déballage prétentieux de culture mais plus à un voyage dans l’histoire des lettres et de l’Histoire comme l’auteur décide de la montrer afin de servir ses propos.
Il ne faut pas se mentir, le titre évocateur de ses mois passés à l’Hôtel de Matignon est en réalité trompeur. Il s’agit du décor du livre mais en aucun cas du contenu premier, le décor des longues nuits d’insomnie du premier ministre, face à la difficulté du pouvoir.
« Comment trouver la paix quand les yeux brûlent tellement que, même fermés, ils restent ouverts à l’intérieur ? »
Néanmoins, on n’en est que plus porté par le cours d’histoire permanent du fil des pages. Au travers de sa thèse principale : la perte de la notion de vraie politique et des vraies valeurs du monde, l’auteur distille sa propre vision politique et géopolitique. On perçoit là son expérience de ministre des affaires étrangères. On sent même à certains moments, lors de l’évocation du proche orient, revenir à la surface le discours fabuleux prononcé à l’ONU à la veille de la seconde guerre du Golfe. D. De Villepin avait ce jour-là éclaboussé de sa classe et de sa vision rationnelle et humaine le monde entier et avait été longuement applaudi, tandis que certains journalistes étrangers disaient de lui qu’il ne marchait pas dans les couloirs de l’ONU mais qu’il y volait tant son charisme était fort.
« Il ne faut pas céder aux tentations d’un nouveau totalitarisme. A nous de jeter des ponts qui, d’une rive à l’autre, permettent l’échange dans le respect des identités premières. »
On ressent bien cela pendant le livre. L’auteur nous fait voyager à travers ses évocations comme je me souviens d’en avoir vécu de temps en temps en classe. Vous savez, lorsque la passion d’un pédagogue vous fait oublier qu’il s’agit d’apprentissage et que porté par la passion et la superbe du discours, on se laisse porté par le récit. Ce livre m’a inspiré cela : la passion et l’envie d’en apprendre plus encore. Je ne connaissais pas la moitié des personnages évoqués dans le livre mais ai apprécié d’en apprendre énormément à leur sujet. Le style de l’auteur y est pour beaucoup certainement.
Les mots chantent sous la plume de l’auteur. Tout y est parfaitement nommé. Le style est léger, clair et l’auteur n’abuse pas des formes grammaticales. Il connaît la langue française et sait placer chaque mot là où il faut sans devoir périphraser pour le définir. C’est une grande force qui démontre sa parfaite maîtrise de la langue.
En conclusion il s’agit là d’un très bon livre. Pas tout à fait ce à quoi je m’attendais pour ne pas mentir, mais une grande bouffée d’air frais dans notre époque de prémâchage journalistique et d’interprétations souvent rapides et hasardeuses de l’actualité.
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Blog de Martin Régent - Un monde de procrastination » Vision éclairée…. | 23 juin 2008 | 23:16[...] in “ Hôtel de l’insomnie, ed Plon“ [...]